23 Novembre 2010

Du dioxyde de soufre dans la haute atmosphère de Vénus

Grâce à un instrument de mesure développé avec le soutien du CNES à bord de la sonde Venus Express, une équipe internationale (1) a pu mettre en évidence la présence de dioxyde de soufre dans la haute atmosphère de Venus.

23 novembre 2010

De la brume d’acide sulfurique

« L’atmosphère de Vénus est très riche en dioxyde de soufre, mais personne ne s’attendait à en trouver à cette altitude. Même l’équipe californienne du professeur Yung, spécialiste en chimie de l’atmosphère, ne l’avait pas prévu dans ses modèles », constate Jean-Loup Bertaux, responsable scientifique de SPICAV au LATMOS.

Le dioxyde de soufre (SO2) - à l’origine de l’épaisse couche de nuages d’acide sulfurique qui recouvre Vénus - a été mis en évidence dans la haute atmosphère, entre 90 et 110 km d’altitude.

Comment ? Grâce à la sonde Venus Express, et plus particulièrement au spectromètre SPICAV, développé avec le soutien du CNES.

« Avec SPICAV, on utilise la méthode d’occultation solaire, explique Jean-Loup Bertaux. On attend que le Soleil se couche et on analyse le rayonnement solaire à travers l’atmosphère. Et comme le SO2 absorbe une partie du rayonnement UV, on peut en déduire sa quantité avec une très bonne distribution verticale. »

Pour les scientifiques, le SO2 présent dans la haute atmosphère proviendrait de la brume d’acide sulfurique.

A partir de 90 km d’altitude, la température est en effet suffisante pour que l’acide sulfurique s’évapore et se décompose en SO2 sous l’effet du rayonnement solaire.

Des idées pour refroidir la Terre

« On pourrait se dire que Vénus est loin de nous, mais on retrouve ce type de phénomène sur Terre », s’enthousiasme Jean-Loup Bertaux.

Au moment des éruptions volcaniques, du SO2 est projeté dans l’atmosphère, à environ 20 km d’altitude, et se transforme en gouttelettes d’acide sulfurique.

Or, ces gouttelettes renvoient une grande partie du rayonnement solaire vers l’espace, et refroidissent la Terre à la manière d’une ombrelle.

Un exemple : après l’éruption du Pinatubo aux Philippines, la température a baissé de 0,5°C à la surface de la Terre !

C’est ainsi que le prix Nobel de chimie Paul Crutzen a eu l’idée d’injecter artificiellement de grandes quantités de SO2 dans l’atmosphère pour refroidir le sol et contrebalancer l’effet de serre grandissant. « Ce type de solution est intéressant, mais nécessite d’être étudié en long, en large et en travers », réagit Jean-Loup Bertaux.

« La modélisation seule ne nous permet pas d’anticiper ce qui se va se passer. On a aussi besoin d’expérimenter. Et avec Vénus, on a un terrain expérimental remarquable puisqu’il y a une très grande quantité de gouttelettes d’acide sulfurique. En ce sens, l’étude de Vénus est aussi pertinente pour la Terre », conclut-il.

(1) Equipes du California Institute of Technology, de l'Université du Michigan, de l'Academia Sinica et de la National Central University de Taïwan, du LATMOS (Laboratoire atmosphères, milieux, observations spatiales, CNRS/UMPC/UVSQ).

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