1 Juillet 2019

[LUNE] Le voile se lève sur la face cachée

Inexplorée jusqu’à l’alunissage de la sonde chinoise Chang’e 4 et de son rover Yutu-2, la face cachée de la Lune est aujourd’hui l’objet de toutes les attentions.
is_lander-snaps-yutu2-11jan2019.jpg
Le 03/01/2019, Yutu-2 est devenu le 1er rover à explorer la phase cachée de la Lune. Photo prise par l'atterrisseur de Chang'e-4. Crédits : CNSA/CLEP.

L’écho médiatique a été à la hauteur de l’exploit technologique. Le 03 janvier 2019, la sonde chinoise Chang’e 4 était le premier engin à se poser sur la face cachée de la Lune, 50 ans après la mission Apollo 11. Ce succès de l’agence chinoise CNSA revêt une importance symbolique de premier ordre dans le contexte d'une nouvelle course à la Lune projetant une trentaine de missions lunaires dans les quinze prochaines années. Parmi celles-ci, beaucoup ont pour cible la face cachée, une zone plus difficile à atteindre en raison de l’impossibilité des communications directes avec la Terre et où les alunissages sont rendus compliqués par l’abondance des cratères. 

Aux origines du Système solaire

Les scientifiques attendent de ces nouvelles explorations une meilleure caractérisation du sol et du sous-sol lunaire, potentiellement riche en ressources (oxygène, minéraux) qui pourraient être exploitées dans le cadre d’une base lunaire ou de missions spatiales lointaines. 

Aux pôles, l’analyse des glaces présentes au fond des cratères pourrait confirmer l’origine cométaire de l’eau et améliorer nos connaissances sur les matériaux à l’origine du Système solaire

Dans la région du pôle Sud, le rover Yutu-2 arpente depuis janvier le bassin Aitken situé sur la face cachée, plus grand cratère du Système solaire, profond de 13 km. La datation de ses roches pourrait  valider de la théorie du grand bombardement tardif, une intensification des impacts météoritiques et cométaires survenue il y a 4 milliards d’années.

Or cette hypothèse joue un rôle important dans la compréhension de l’émergence de la vie sur Terre 

explique Francis Rocard, responsable des programmes d’exploration du Système solaire au CNES.


Le bassin Aitkin (en violet). Crédit : NASA.

Une nouvelle ouverture sur l’Univers

La prochaine étape sera la collecte et le retour d’échantillons. Après Chang'e 5 qui rapportera des échantillons lunaires pour la première fois depuis 1976, la mission Chang'e 6, en 2023-2024, pourrait cibler la face cachée et le bassin Aitken. La France y participera au terme de l’accord bilatéral de coopération signé avec la Chine en mars 2019 sous une forme qui reste à déterminer. Plusieurs projets de radars, d’instruments d’analyse ou de caméras sont actuellement à l’étude.

Enfin, la face cachée constitue un poste d’observation privilégié de l’Univers, totalement à l’abri des ondes radio terrestres. Elle pourrait accueillir un radiotéléscope destiné à capter les ondes radio venant des planètes géantes et des galaxies lointaines.

gp_change4-rover-yutu2.jpg

Le rover Yutu-2 arpente la face cachée. Crédits : CNSA.


La face cachée, mais de quoi parle-t-on ? 

La Lune présente toujours la même face à la Terre. Ce phénomène est dû à l’« effet de marée » entre notre planète et son satellite naturel qui synchronise les périodes de rotation et de révolution de la Lune. Celle-ci met exactement le même temps, 27 jours, pour tourner sur elle-même et autour de la Terre. Une partie de la Lune n’est donc jamais observable de la Terre, c’est la face cachée. Cachée, mais pas inconnue, puisqu’elle a été photographiée dès 1959 par la sonde soviétique Luna 3 et survolée par de nombreuses sondes depuis les années 2000.